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Instruction du 23 mai 2016 relative à la protection rapprochée et à l’accompagnement de sécurité des personnes par la police nationale
NOR : NOR : INTC1613763J
1. Préambule
La protection rapprochée d’une personne peut se définir comme l’ensemble des compétences ou moyens techniques, humains et matériels mis en oeuvre pour garantir son intégrité physique. Elle repose sur une évaluation de la menace et des risques. Elle suppose une parfaite connaissance de l’environnement, de la fonction et des activités de la personne protégée.
Dans le cadre de sa mission régalienne de sécurité, la police nationale assure la protection physique rapprochée de certaines personnes. La présente instruction vise à uniformiser les pratiques et de fixer un ensemble de règles visant à délimiter le champ de ces missions et définissant les procédures à appliquer.
La protection rapprochée, mesure personnelle et temporaire, ne peut être accordée que sur des fondements légitimes, connus et partagés, dans le respect d’une procédure définie et formalisée.
Au sein de la police nationale, les missions de protection rapprochée sont réalisées par le service de la protection (SDLP) qui « assure, sur le territoire français et à l’étranger, la protection rapprochée ou l’accompagnement de sécurité de personnes françaises ou étrangères » (arrêté du 12 août 2013).
2. Conditions d’octroi et procédure de mise en oeuvre
Le SDLP est chargé de la sécurité des membres du gouvernement et de certaines personnalités auxquelles, en fonction des risques et menaces évalués par les services spécialisés et sur décision du ministre de l’intérieur, de telles mesures sont accordées.
Ce service est également chargé de la protection rapprochée ou de l’accompagnement de sécurité des chefs d’États et de gouvernement étrangers en visite officielle ou privée sur le territoire de la République et des hautes personnalités étrangères auxquelles, en fonction des risques et menaces évalués par les services spécialisés, de telles mesures sont accordées.
2.1. Conditions d’octroi
Au regard de l’arrêté précité, les dispositifs de protection rapprochée reposent sur deux fondements : le rang protocolaire de la personnalité ou le niveau de menace susceptible de peser sur la personne.
Concernant la première catégorie de personnes, les bénéficiaires, français et étrangers, sont strictement énumérés : il s’agit du Président de la République et des membres du gouvernement français d’une part, des chefs d’États ou de gouvernement étrangers en visite sur le territoire d’autre part. Ce droit n’est pas exclusif d’une évaluation de la menace qui sert à adapter le dispositif au niveau de risque.
S’agissant de la seconde catégorie, l’unité de coordination de la lutte anti-terroriste (UCLAT) est chargée de déterminer la réalité et le niveau de menace susceptible de peser sur les personnes. Pour ce faire, ce service s’est doté d’une grille d’évaluation comportant quatre degrés numérotés de 4 à 1 et caractérisant un niveau de risque croissant :
- niveau 4 : personnalité étrangère / ressortissant français non menacé sur le territoire ;
- niveau 3 : personnalité étrangère / ressortissant français potentiellement menacé sur le territoire français, éventuellement en raison de son appartenance politique, ethnique, sociale ou religieuse ;
- niveau 2 : personnalité étrangère menacée avec risques limités de transfert ou de concrétisation de cette menace sur notre territoire / ressortissant français menacé sur le territoire, avec risques limités ou non prévisibles de concrétisation ;
- niveau 1 : personnalité étrangère menacée avec risques élevés de transfert de cette menace sur notre territoire / ressortissant français fortement menacé sur le territoire national.
L’UCLAT évalue la menace au vu de l’existence de renseignements ou de faits laissant transparaître une volonté d’atteinte à la personne concernée, de la notoriété et de l’activité de la personne évaluée ainsi que du contexte sécuritaire ambiant. Elle complète son analyse hors terrorisme par une appréciation, si nécessaire, des risques afférents à de possibles manifestations affectant l’ordre public.
2.2. Procédure de mise en oeuvre
La notion de risque étant souvent associée à celle de l’urgence, les demandes de protection font l’objet d’un traitement immédiat dématérialisé. Pour cette raison, il est instauré un « guichet unique » d’entrée des demandes de protection de façon à optimiser le délai de leur traitement.
Ce point d’entrée officiel des demandes est l’état-major du cabinet du DGPN, quelle que soit l’origine de la demande.
L’état-major saisit l’UCLAT auxfins d’évaluation du niveau de la menace. À réception des résultats de l’évaluation, l’état-major établit une fiche « navette » qui est transmise au service de la protection pour définition des mesures de sécurité appropriées.
En retour, le service de la protection formalise et transmet un avis technique comportant la préconisation d’un dispositif de sécurité adapté au niveau de menace défini par l’UCLAT. L’état-major a un rôle de validation de cet avis puis de transmission au cabinet du ministre de l’intérieur.
La décision du ministre de l’intérieur, rendue à l’issue de cette procédure, est ensuite mise en oeuvre dans des délais compatibles avec les impératifs de sécurité propres à chaque situation.
3. Dispositifs de protection
Au-delà de sa fonction premièrequi consiste en une aide à la décision quant à l’opportunité d’accorder ou non une protection rapprochée, l’évaluation de la menace permet également d’adapter les dispositifs mis en oeuvre et de dimensionner les moyens dédiés.
3.1. Les dispositifs de protection du SDLP
Il existe deux types de protection individuelle : l’accompagnement de sécurité et la protection rapprochée. Ces missions sont effectuées par des policiers sélectionnés, formés et équipés (notamment armés) spécifiquement, désignés généralement par le terme « officier de sécurité ».
3.1.1. L’accompagnement de sécurité
L’accompagnement de sécurité est un dispositif de protection adapté à une menace diffuse ou faible. En fonction des circonstances, l’officier de sécurité peut solliciter les forces locales après accord du préfet territorialement compétent.
Il existe deux niveaux d’accompagnement de sécurité :
Accompagnement de sécurité élémentaire (ASE) :
Le service de la protection affecte auprès de la personne menacée un seul officier de sécurité. Il n’y a pas nécessairement continuité dans l’exécution de la mission. Il peut s’agir des cas pour lesquels il n’existe pas de menace précise connue et où le dispositif de sécurité est mis en place en raison des fonctions exercées ou du rang de la personnalité (cas de certains magistrats ou de certaines personnalités civiles qui correspondent à des UCLAT 4 ou 3).
Accompagnement de sécurité renforcé (ASR) :
L’accompagnement de sécurité peut être renforcé : la personne menacée est accompagnée en permanence d’un officier de sécurité. La notion de continuité impose alors l’affectation d’un second officier de sécurité.
Dans les deux cas, lorsque les circonstances l’exigent et afin de permettre un bon déroulement de la mission, il peut être décidé d’allouer un véhicule à l’officier de sécurité. Cette voiture peut être conduite par un conducteur de sécurité du service et la personnalité autorisée exceptionnellement à monter à bord.
De même, le dispositif peut être complété par des mesures de sécurité assurées par les policiers ou gendarmes locaux après accord du préfet territorialement compétent.
3.1.2. La protection rapprochée
La protection rapprochée est un dispositif de sécurité complet. Elle est développée en présence d’une menace sérieuse et individualisée. Il faut aussi distinguer deux niveaux :
Protection rapprochée élémentaire (PRE) :
Le dispositif de protection rapprochée se compose au minimum de trois officiers de sécurité assurant la protection physique, d’un conducteur de sécurité et d’un véhicule de police. Il est complété en cas de nécessité par des mesures de sécurité périmétriques pouvant être confiées à des policiers ou gendarmes locaux après accord du préfet territorialement compétent.
Protection rapprochée renforcée (PRR) :
Outre la présence continue d’au moins trois officiers de sécurité, le dispositif de protection comporte des éléments précurseurs et de contre filature.
Dans tous les cas, les dispositifs reposent sur le plein accord de la personnalité protégée. De même, lorsqu’une personnalité le demande expressément, les dispositifs peuvent être provisoirement interrompus.
Les conditions de la relation entre la personne protégée et le service en charge de la protection sont notifiées au bénéficiaire lors de la mise en place d’un dispositif de protection (Cf. annexes).
3.2. Les dispositifs alternatifs ou complémentaires
L’accroissement signicatif du nombre de protections sollicitées et la densification de certains dispositifs conduisent à envisager des solutions alternatives ou complémentaires en matière de protection.
S’agissant de personnes dont le niveau de menace est faible et qui ne s’exposent pas de manière régulière, il peut être décidé d’attribuer certaines missions de protection aux services territoriaux de police et de gendarmerie après accord du préfet territorialement compétent. Ces missions prennent la forme de patrouilles aux abords du lieu de résidence des personnes ou de garde statique de ces lieux.
Dans la situation d’une menace élevée pesant sur une personne, certaines missions de protection rapprochée de courte durée peuvent être renforcées par des unités spécialisées compte tenu de leur niveau de technicité et d’équipement. Il peut s’agir du RAID sur le territoire français ou des forces armées sur les théâtres d’opération à l’étranger.
4. Dispositions diverses
La protection rapprochée ne peut s’exercer efficacement que dès lors qu’elle s’inscrit dans un dispositif global et coordonné de sécurité incluant l’ensemble des partenaires étatiques ou non qui concourent à la sécurité d’une personnalité. Ainsi, l’appui de services extérieurs est indispensable, sous la coordination des préfets territorialement compétents et en collaboration permanente avec les responsables de la police ou de la gendarmerie sur les sites de déplacement ou de séjour des personnalités.
À cet effet, dans le cadre des visites officielles sur le territoire de la République, le chef du service de la protection ou son représentant se met à la disposition du représentant de l’État qu’il assiste en tant que conseiller technique pour l’élaboration des mesures nécessaires, avec l’aide des policiers du service de la protection.
4.1. Les services concourant à la mission de protection
Si les policiers affectés au service de la protection sont spécifiquement recrutés sur des critères exigeants, formés au métier de la protection rapprochée et entretenus dans un haut niveau de professionnalisme, le volume des missions confiées à ce service justifie ponctuellement l’utilisation de renforts extérieurs.
De manière permanente, la compagnie républicaine de sécurité n°1 est placée pour emploi sous l’autorité du chef du service de la protection. Elle assure notamment les missions de garde statique, de filtrage ainsi que les escortes motorisées de certaines personnalités dans des situations protocolaires clairement définies.
Ponctuellement, pour faire face à des contraintes capacitaires du SDLP ou dans le cadre de déplacements de courte durée de personnalités faiblement menacées, il peut être fait appel, par l’intermédiaire du cabinet du DGPN, à des policiers prélevés sur l’ensemble des services du périmètre DGPN.
Dans le cadre de leur mission, les officiers de sécurité sont fondés à recourir à l’utilisation de moyens relevant d’autres services dans les formes prévues. Il s’agit notamment et de manière non exhaustive de moyens nécessaires à la détection d’explosifs, à la tenue de points hauts ou encore d’escortes motocyclistes.
4.2. La commission des protections
Afin de réaffirmer le caractère temporaire de la protection rapprochée, l’article 14 de l’arrêté du 12 août 2013 relatif aux missions et à l’organisation du service de la protection a repris les dispositions de l’article 13 de l’arrêté du 17 décembre 2008 créant une commission d’évaluation des mesures de protection, placée sous l’autorité du directeur du cabinet du ministre de l’intérieur ou de son représentant.
Cette commission comprend exclusivement le préfet de police, le DGPN, le DGGN, le chef du SDLP et le chef de l’UCLAT ou leurs représentants. Le cas échéant, il peut être fait appel à toute personne dont l’expertise est requise.
Elle peut être réunie à tout moment à la demande du ministre de l’intérieur et au moins deux fois par an. Elle rend un avis au ministre de l’intérieur, en fonction des risques et menaces évalués par les services spécialisés, sur l’octroi ou le maintien de toute mesure de protection rapprochée ou d’accompagnement de sécurité. Elle peut aussi émettre un avis sur la nature et le degré de protection accordée. Toutefois, le ministre de l’intérieur peut décider de ne pas la consulter lorsque la situation le justifie, notamment en cas d’urgence.
Fait le 23 mai 2016.
Pour le ministre et par délégation :
Le directeur général de la police nationale,
J .-M. Falcone
ANNEXE 1
Madame, Monsieur,
Sur décision du ministre de l’intérieur, vous bénéficiez désormais d’un dispositif d’accompagnement de sécurité. Il répond à des modes de fonctionnement adaptés au niveau de menace déterminé par les services spécialisés. Il me semble important de vous les présenter afin de garantir une efficacité maximale.
• Un officier de sécurité du Service De La Protection (SDLP) sera présent à vos côtés pour chacun de vos déplacements. Il s’agit d’un policier spécialement formé et entraîné pour ce type de mission.
• Il est essentiel qu’il connaisse votre domicile, votre environnement et le plus en amont possible votre agenda. Son rôle ne se limite pas en effet à un simple accompagnement.
Il doit être en mesure de faire évaluer les risques ou menaces liés à tel ou tel événement, de solliciter l’appui d’autres services de police ou encore d’envisager la mise en place de mesures de sécurisation spécifiques.
• En fonction des éléments en sa possession, le SDLP peut vous déconseiller de vous rendre sur un site particulier ou un pays à risques. Cette position s’appuiera toujours sur une analyse technique. Elle vous sera clairement présentée. Si vous décidez malgré tout de maintenir votre projet, le SDLP se désengagera alors ponctuellement.
• Pour certaines missions, un véhicule peut être mis à disposition de l’officier de sécurité. Il s’agit d’une décision fondée sur des impératifs de sécurité. Cette automobile est conduite par un autre policier et peut servir à votre transport ou être positionnée derrière votre véhicule personnel. Dans tous les cas, aucune autre personne ne peut être admise à son bord et le conducteur devra respecter scrupuleusement les règles du code de la route. Sauf raison de sécurité dûment motivée, l’usage du gyrophare ou des avertisseurs sonores est strictement prohibé.
Vous avez rencontré lors de la mise en place du dispositif, un des officiers-référents du SDLP. Il restera pendant toute la durée de la mission votre interlocuteur privilégié.
ANNEXE -DPN-3.2 A
Madame, Monsieur,
Sur décision du ministre de l’intérieur, vous bénéficiez désormais d’un dispositif de protection rapprochée. Il répond à des modes de fonctionnement adaptés au niveau de menace déterminé par les services spécialisés. Il me semble important de vous les présenter afin de garantir une efficacité maximale.
• Au moins trois officiers de sécurité du Service De La Protection (SDLP) seront présents à vos côtés pour chacun de vos déplacements. Il s’agit de policiers spécialement formés et entraînés pour ce type de mission.
• Il est essentiel qu’ils connaissent votre domicile, votre environnement et le plus en amont possible votre agenda. Ils doivent continuellement être en mesure de faire é valuer les risques ou menaces liés à tel ou tel événement, de solliciter l’appui d’autres services de police ou encore d’envisager la mise en place de mesures de sécurisation spécifiques.
• En fonction des éléments en sa possession, le SDLP peut vous déconseiller de vous rendre sur un site particulier ou un pays à risques. Cette position s’appuiera toujours sur une analyse technique. Elle vous sera clairement présentée. Si vous décidez malgré tout de maintenir votre projet, le SDLP se désengagera alors ponctuellement.
• Un véhicule peut être mis à disposition afin de vous transporter. Il s’agit d’une décision fondée sur des impératifs de sécurité. Dans tous les cas, aucune autre personne ne peut être admise à son bord et le conducteur devra respecter scrupuleusement les règles du code de la route. Sauf raison de sécurité dûment motivée, l’usage du gyrophare ou des avertisseurs sonores est strictement prohibé. Un second véhicule de sécurité sera positionné à l’arrière.
Vous avez rencontré lors de la mise en place du dispositif, un des officiers-référents du SDLP. Il restera pendant toute la durée de la mission votre interlocuteur privilégié.