Règlement (UE) 2020/1149 de la Commission du 3 août 2020 modifiant l’annexe XVII du règlement (CE) n° 1907/2006 du Parlement européen et du Conseil concernant l’enregistrement, l’évaluation et l’autorisation des substances chimiques, ainsi que les restrictions applicables à ces substances (REACH), en ce qui concerne les diisocyanates

Date de signature :03/08/2020 Statut du texte :En vigueur
Date de publication :04/08/2020 Emetteur :
Consolidée le : Source :JOUE L252 du 4 août 2020
Date d'entrée en vigueur :24/08/2020
Règlement (UE) 2020/1149 de la Commission du 3 août 2020 modifiant l’annexe XVII du règlement (CE) n° 1907/2006 du Parlement européen et du Conseil concernant l’enregistrement, l’évaluation et l’autorisation des substances chimiques, ainsi que les restrictions applicables à ces substances (REACH), en ce qui concerne les diisocyanates​

(Texte présentant de l’intérêt pour l’EEE)


LA COMMISSION EUROPÉENNE, considérant ce qui suit :

(1) Les diisocyanates sont classés, selon la classification harmonisée, comme sensibilisant respiratoire de catégorie 1 et comme sensibilisant cutané de catégorie 1 conformément au règlement (CE) n°1272/2008 du Parlement européen et du Conseil (2). Dans toute l’Union, les diisocyanates sont utilisés comme éléments constitutifs chimiques dans un large éventail de secteurs et d’applications, notamment, entre autres, dans les mousses, les agents d’étanchéité et les revêtements.

(2) Le 6 octobre 2016, l’Allemagne a présenté à l’Agence européenne des produits chimiques (ci-après l’«Agence») un dossier (3) en vertu de l’article 69, paragraphe 4, du règlement (CE) n°1907/2006 (ci-après le «dossier conforme à l’annexe XV») en vue d’engager la procédure de restriction prévue aux articles 69 à 73 dudit règlement. Le dossier conforme à l’annexe XV a indiqué que la sensibilisation respiratoire, due à l’exposition par voie cutanée et par inhalation aux diisocyanates, provoque un asthme professionnel chez les travailleurs, ce qui a été reconnu comme étant un problème majeur de santé au travail dans l’Union. Le nombre annuel de nouveaux cas de maladies professionnelles imputables aux diisocyanates (estimé à plus de 5 000 cas) est jugé inacceptable. Le dossier conforme à l’annexe XV a démontré qu’une action à l’échelle de l’Union était nécessaire et a proposé de restreindre les utilisations industrielles et professionnelles ainsi que la mise sur le marché des diisocyanates tels quels, comme constituant d’autres substances et dans des mélanges.

(3) La restriction proposée dans le dossier conforme à l’annexe XV vise à limiter l’utilisation des diisocyanates dans les applications industrielles et professionnelles aux cas où une combinaison de mesures techniques et organisationnelles est mise en œuvre et où une formation normalisée minimale a été suivie. Les informations sur la manière d’accéder à la formation devraient être communiquées tout au long de la chaîne d’approvisionnement et il devrait incomber aux opérateurs mettant ces substances et mélanges sur le marché de veiller à ce que les destinataires de ces substances ou mélanges puissent avoir accès à des cours de formation.

(4) Le 5 décembre 2017, le comité d’évaluation des risques (ci-après le «CER») de l’Agence a adopté son avis (4) dans lequel il conclut que la restriction proposée, telle que modifiée par le CER, constitue, sur le plan de l’efficacité, la mesure la plus appropriée à l’échelle de l’Union pour réduire les risques mis en évidence résultant de l’exposition à ces substances. En outre, il a estimé que la mise en œuvre de la restriction proposée modifiée réduirait également le nombre de cas de dermatite liés aux diisocyanates.

(5) Le CER a conclu qu’une formation appropriée était une nécessité de base et que tout travailleur manipulant des diisocyanates devrait posséder une connaissance suffisante des dangers présentés par ces substances, être conscient des risques liés à leurs utilisations et être suffisamment informé des bonnes pratiques de travail et des mesures de gestion des risques appropriées, y compris de l’utilisation correcte d’équipements de protection individuelle adaptés. Le CER a indiqué que des mesures de formation particulières sont nécessaires pour sensibiliser à l’importance de la protection de la santé au moyen de mesures de gestion des risques appropriées et de pratiques sûres en matière de manipulation.

(6) Le CER a estimé que la valeur limite de 0,1 % en poids, fixée pour les diisocyanates dans une substance ou dans un mélange, correspond à la valeur limite de concentration la plus basse existante pour certains diisocyanates classés comme sensibilisants respiratoires de catégorie 1. Le CER a également approuvé l’avis de l’autorité ayant soumis le dossier selon lequel la mise en œuvre d’une limite d’exposition professionnelle indicative ou contraignante ne suffirait pas à réduire le nombre de cas d’asthme professionnel au niveau le plus bas possible, puisqu’à l’heure actuelle, aucun seuil n’est connu pour l’effet sensibilisant des diisocyanates.

(7) Le 15 mars 2018, le comité d’analyse socio-économique (ci-après le «CASE») de l’Agence a adopté son avis (5), dans lequel il a confirmé la conclusion du CER selon laquelle, compte tenu de ses coûts et avantages socio-économiques, la restriction proposée est la mesure la plus appropriée à l’échelle de l’Union pour faire face aux risques mis en évidence. En outre, le CASE a conclu que la restriction proposée est financièrement supportable pour les chaînes d’approvisionnement concernées.

(8) Le CASE a recommandé de reporter de quarante-huit mois l’application de la restriction afin de laisser suffisamment de temps à tous les acteurs pour la mise en œuvre intégrale des exigences liées à la restriction.

(9) Le forum de l’Agence spécialisé dans l’échange d’informations sur la mise en œuvre, visé à l’article 76, paragraphe 1, point f), du règlement (CE) n°1907/2006 a été consulté sur les avis du CER et du CASE relatifs à la restriction proposée et ses recommandations ont été prises en considération.

(10) Le 9 mai 2018, l’Agence a soumis les avis du CER et du CASE à la Commission. Sur la base de ces avis, la Commission conclut qu’un risque inacceptable pour la santé humaine découle de l’utilisation ou de la mise sur le marché des diisocyanates tels quels, comme constituant d’autres substances et dans des mélanges. La Commission considère qu’il est nécessaire de traiter ces risques à l’échelle de l’Union.

(11) Compte tenu du dossier conforme à l’annexe XV ainsi que des avis du CER et du CASE, la Commission considère qu’une exigence minimale de formation devrait être prévue pour les utilisateurs industriels et professionnels, sans préjudice d’obligations nationales plus strictes dans les États membres. La Commission considère également que les informations relatives à cette exigence devraient être incluses dans l’emballage.

(12) Aux fins d’éventuelles révisions futures de la restriction actuelle, les États membres devraient soumettre à la Commission un rapport, conformément à l’article 117, paragraphe 1, du règlement (CE) n°1907/2006, dans lequel figurent toute exigence de formation établie, le nombre de cas signalés d’asthme professionnel et de maladies respiratoires et cutanées professionnelles, tout niveau national d’exposition professionnelle et des informations relatives aux activités de contrôle de l’application.

(13) Sans préjudice de la législation de l’Union en matière de sécurité et de santé au travail, en particulier de la directive 98/24/CE du Conseil relative aux agents chimiques (6), la présente restriction vise à renforcer la capacité des employeurs à atteindre un niveau plus élevé de contrôle des risques. Les petites et moyennes entreprises bénéficieront de cet acte, qui améliorera encore la mise en œuvre des exigences actuelles en matière de sécurité et de santé au travail en fournissant des programmes de formation spécifiques aux diisocyanates tout au long de la chaîne d’approvisionnement.

(14) Les opérateurs économiques devraient bénéficier d’une période d’une durée suffisante pour pouvoir s’adapter aux nouvelles exigences. Une période transitoire de trois ans est appropriée pour permettre à la main-d’œuvre concernée d’effectuer la formation requise.

(15) Il convient donc de modifier en conséquence le règlement (CE) no 1907/2006.

(16) Les mesures prévues par le présent règlement sont conformes à l’avis du comité institué par l’article 133 du règlement (CE) n°1907/2006,

A ADOPTÉ LE PRÉSENT RÈGLEMENT :

Article premier

L’annexe XVII du règlement (CE) n°1907/2006 est modifiée conformément à l’annexe du présent règlement. 

Article 2

Le présent règlement entre en vigueur le vingtième jour suivant celui de sa publication au Journal officiel de l’Union européenne.

Le présent règlement est obligatoire dans tous ses éléments et directement applicable dans tout État membre.

Fait à Bruxelles, le 3 août 2020.

Par la Commission
La présidente
Ursula VON DER LEYEN 


(1) JO L 396 du 30.12.2006, p. 1.
(2) Règlement (CE) n°1272/2008 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relatif à la classification, à l’étiquetage et à l’emballage des substances et des mélanges, modifiant et abrogeant les directives 67/548/CEE et 1999/45/CE et modifiant le règlement (CE) n°1907/2006 (JO L 353 du 31.12.2008, p. 1).
(3) https://echa.europa.eu/documents/10162/63c411e5-cf0f-dc5e-ff83-1e8de7e4e282
(4) https://echa.europa.eu/documents/10162/737bceac-35c3-77fb-ba7a-0e417a81aa4a 
 (5) https://echa.europa.eu/documents/10162/d6794aa4-8e3a-6780-d079-77237244f5f9
(6) Directive 98/24/CE du Conseil du 7 avril 1998 concernant la protection de la santé et de la sécurité des travailleurs contre les risques liés à des agents chimiques sur le lieu de travail (JO L 131 du 5.5.1998, p. 11). 




ANNEXE

À l’annexe XVII du règlement (CE) n°1907/2006, l’entrée suivante est ajoutée : 
 
«74. Diisocyanates, O = C=NR-N = C=O, R étant une unité d’hydrocarbure aliphatique ou aromatique de longueur non spécifiée»  1. Ne peuvent être utilisés comme substances telles quelles, comme constituant d’autres substances ou dans des mélanges pour usage(s) industriel(s) et professionnel(s) après le 24 août 2023, sauf si :
a) la concentration en diisocyanates, individuellement et en combinaison, est inférieure à 0,1 % en poids, ou
b) l’employeur ou le travailleur indépendant veille à ce que le(s) utilisateur(s) industriel (s) ou professionnel(s) ai(en)t suivi avec succès une formation sur l’utilisation sûre des diisocyanates avant l’utilisation de la ou des substances ou du ou des mélanges.

2. Ne peuvent être mis sur le marché comme substances telles quelles, comme constituant d’autres substances ou dans des mélanges pour usage(s) industriel(s) et professionnel(s) après le 24 février 2022, sauf si :
a) la concentration en diisocyanates, individuellement et en combinaison, est inférieure à 0,1 % en poids, ou
b) le fournisseur veille à ce que le destinataire de la ou des substances ou du ou des mélanges reçoive les informations relatives aux exigences prévues au point 1 b), et à ce que la mention suivante soit placée sur l’emballage, d’une manière visuellement distincte des autres informations figurant sur l’étiquette: «À partir du 24 août 2023, une formation adéquate est requise avant toute utilisation industrielle ou professionnelle».

3. Aux fins de la présente entrée, on entend par «utilisateur(s) industriel(s) et professionnel(s)», tout travailleur salarié ou travailleur indépendant qui manipule des diisocyanates tels quels, comme constituant d’autres substances ou dans des mélanges pour usage(s) industriel(s) et professionnel(s), ou qui supervise ces tâches.

4. La formation visée au point 1 b) inclut des instructions pour le contrôle de l’exposition par voie cutanée et par inhalation aux diisocyanates sur le lieu de travail, sans préjudice de toute valeur limite d’exposition professionnelle nationale ou d’autres mesures de gestion des risques appropriées au niveau national. Cette formation est dispensée par un expert en matière de sécurité et de santé au travail possédant des compétences acquises dans le cadre d’une formation professionnelle pertinente. Ladite formation porte au minimum sur :
a) les éléments de formation énoncés au point 5 a) pour tous les usages industriels et professionnels;
b) les éléments de formation énoncés aux points 5 a) et b) pour les utilisations suivantes :
— manipulation de mélanges ouverts à température ambiante (y compris tunnels à mousse);
— pulvérisation dans une cabine ventilée;
— application au rouleau;
— application à la brosse;
— application par trempage et coulage;
— post-traitement mécanique (par exemple, découpe) d’articles non complètement durcis qui ne sont plus chauds;
— nettoyage et déchets;
— toute autre utilisation entraînant une exposition similaire par voie cutanée et/ou par inhalation;

c) les éléments de formation énoncés aux points 5 a), b) et c) pour les utilisations suivantes :
— manipulation d’articles non complètement durcis (par exemple, fraîchement durcis, encore chauds);
— applications de fonderie;
— entretien et réparation nécessitant un accès à l’équipement;
— manipulation ouverte de formulations chaudes ou très chaudes (> 45 °C);
— pulvérisation en plein air, avec ventilation limitée ou uniquement naturelle (y compris grands locaux de travail industriels) et pulvérisation à haute énergie (par exemple, mousses, élastomères);
— et toute autre utilisation entraînant une exposition similaire par voie cutanée et/ou par inhalation. 

5. Éléments de formation :
a) formation générale, y compris en ligne, sur les aspects suivants :
— chimie des diisocyanates;
— risques de toxicité (y compris toxicité aiguë);
— exposition aux diisocyanates;
— valeurs limites d’exposition professionnelle;
— causes de développement d’une sensibilisation;
— odeur comme indication de danger;
— importance de la volatilité pour les risques;
— viscosité, température et poids moléculaire des diisocyanates;
— hygiène personnelle;
— équipements de protection individuelle nécessaires, y compris les instructions pratiques pour une utilisation correcte et leurs limites;
— risque de contact cutané et d’exposition par inhalation;
— risque lié au processus d’application utilisé;
— système de protection de la peau et des voies respiratoires;
— ventilation;
— nettoyage, fuites, entretien;
— élimination des emballages vides;
— protection des personnes présentes;
— identification des phases critiques de manipulation;
— systèmes de codes nationaux spécifiques (le cas échéant);
— sécurité fondée sur le comportement;
— certification ou preuves documentées montrant qu’une formation a été suivie avec succès.

b) formation intermédiaire, y compris en ligne, sur les aspects suivants :
— aspects supplémentaires fondés sur le comportement;
— entretien;
— gestion des changements;
— évaluation des instructions de sécurité existantes;
— risque lié au processus d’application utilisé;
— certification ou preuves documentées montrant qu’une formation a été suivie avec succès.

c) formation avancée, y compris en ligne, sur les aspects suivants :
— toute certification supplémentaire nécessaire pour les utilisations spécifiques concernées;
— pulvérisation à l’extérieur d’une cabine de pulvérisation;
— manipulation ouverte de formulations chaudes ou très chaudes (> 45 °C);
— certification ou preuves documentées montrant qu’une formation a été suivie avec succès.

6. La formation est conforme aux dispositions fixées par l’État membre dans lequel opère (nt) le(s) utilisateur(s) industriel(s) ou professionnel(s). Les États membres peuvent mettre en œuvre ou continuer d’appliquer leurs propres exigences nationales concernant l’utilisation de la ou des substances ou du ou des mélanges, tant que les exigences minimales énoncées aux points 4 et 5 sont respectées.

7. Le fournisseur visé au point 2 b) veille à ce que le destinataire reçoive le matériel et les cours de formation, prévus aux points 4 et 5, dans la ou les langues officielles du ou des États membres dans lesquels la ou les substances ou le ou les mélanges sont fournis. La formation tient compte de la spécificité des produits fournis, y compris de la composition, de l’emballage et de la conception de ceux-ci.

8. L’employeur ou le travailleur indépendant atteste de la réussite de la formation visée aux points 4 et 5. La formation est renouvelée au moins tous les cinq ans.

9. Les États membres font figurer dans leur rapport, prévu à l’article 117, paragraphe 1, les informations suivantes :
a) toutes les exigences de formation établies et les autres mesures de gestion des risques liées aux usages industriels et professionnels des diisocyanates prévues par la législation nationale; 
b) le nombre de cas d’asthme professionnel et de maladies respiratoires et cutanées professionnelles signalés et reconnus en lien avec les diisocyanates;
c) les valeurs limites nationales d’exposition concernant les diisocyanates, le cas échéant;
d) les informations sur les activités d’exécution liées à la présente restriction.

10. La présente restriction s’applique sans préjudice d’autres actes législatifs de l’Union relatifs à la protection de la sécurité et de la santé des travailleurs sur le lieu de travail.»