Arrêté du 27 décembre 2022 relatif aux modalités de suivi physique, de comptabilité et de déclarations comptables des matières nucléaires, pris en application des articles R. 1333-3-2 et R. 1333-11 du code de la défense, pour les activités qui ne sont pas soumises à l’autorisation prévue à l’article R. 1333-4 du même code
NOR :
ENEK2233721A
Publics concernés : toute personne exerçant une activité associée à des matières nucléaires, à l’exception du transport et des activités soumises à autorisation en application de l’article R. 1333-4 du code de la défense.
Objet : modalités de suivi physique, de comptabilité et de déclarations comptables des matières nucléaires.
Entrée en vigueur : le lendemain de la publication du présent arrêté.
Notice : cet arrêté précise les obligations en matière de suivi physique, de comptabilité et de déclarations comptables relatives aux matières nucléaires, c’est-à-dire le plutonium, l’uranium, le thorium, le tritium et le lithium 6.
Il s’applique aux activités d’élaboration, de détention, de transfert, d’utilisation de matières nucléaires, lorsque ces activités ne sont pas soumises à autorisation en application de l’article R. 1333-4 du code de la défense. En pratique, l’arrêté s’applique aux installations qui ne sont pas des points d’importance vitale du secteur de l’énergie (sous-secteur du nucléaire civil) et qui détiennent à tout moment :
- moins de 1 g de plutonium ou d’uranium 233 ;
- moins de 1 g d’uranium 235 contenu dans de l’uranium enrichi en uranium 235 ;
- moins de 500 kg d’uranium naturel ou appauvri, ou de thorium.
Références : chapitre III du titre III du livre III de la partie 1 du code de la défense.
Le ministre des armées et la ministre de la transition énergétique,
- Vu le règlement (Euratom) n° 302/2005 de la Commission du 8 février 2005 relatif à l’application du contrôle de sécurité d’Euratom ;
- Vu le code la défense, notamment ses articles R. 1333-1 et suivants ;
- Vu le code de l’environnement, notamment son article R. 592-39 ;
- Vu l’avis de l’Autorité de sûreté nucléaire en date du 25 octobre 2022,
Arrêtent :
TITRE IER
DISPOSITIONS GÉNÉRALES
Art. 1er. – I. – Le présent arrêté s’applique à toute personne, physique ou morale, appelée « déclarant comptable », exerçant une activité d’élaboration, de détention, de transfert, d’utilisation des matières nucléaires, définies au 1° du II de l’article R. 1333-1 du code de la défense et qui n’est pas soumise à autorisation en application de l’article R. 1333-4 de ce code.
II. – Il ne s’applique pas :
- aux matières nucléaires affectées aux moyens nécessaires à la mise en œuvre de la politique de dissuasion ;
- aux matières nucléaires mises en œuvre uniquement dans le cadre d’une activité de transport ;
- aux matières nucléaires incorporées dans des produits finis à usages non nucléaires, lorsqu’elles sont en pratique irrécupérables ;
- aux matières nucléaires incorporées dans des déchets, une fois qu’ils ont été placés en stockage, au sens de l’article L. 542-1-1 du code de l’environnement ;
- aux minerais dont la concentration est inférieure aux taux suivants :
- pour les minerais uranifères : taux de concentration moyenne de 0,1 % en uranium ;
- pour les minerais thorifères : taux de concentration moyenne de 3 % en thorium ;
- pour les monazites : taux de concentration moyenne de 10 % en thorium et de 0,1 % en uranium ;
- aux autres minerais. Toutefois il s’applique lorsqu’ils sont détenus au sein d’une installation du cycle du combustible nucléaire (concentration, transformation, enrichissement, fabrication, stockage, production d’énergie, retraitement), d’une installation critique ou d’énergie nulle, d’une installation d’entreposage ou de stockage de déchets ;
- aux alliages contenant moins de 5 % en masse de thorium ;
- aux articles marqués par des peintures au tritium pour ses propriétés luminescentes.
Art. 2. – En l’application du IV de l’article R. 1333-11 du code de la défense, le déclarant comptable peut présenter au ministre compétent une demande d’exemption ou un aménagement des prescriptions du présent arrêté.
La demande, dûment argumentée, démontre que ces dispositions sont inapplicables ou sont inadaptées à son activité.
Les exemptions ou aménagements sont accordés par arrêté du ministre compétent.
Art. 3. – Aux fins du présent arrêté, on entend par :
- comptabilité centralisée des matières nucléaires : entité au sein de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) qui assure la tenue de la comptabilité centralisée des matières nucléaires, pour le compte du ministre de la défense et du ministre chargé de l’énergie, en application du 8° du II de l’article R. 592-39 du code de l’environnement ;
- compte déclarant : pour un déclarant comptable soumis à déclaration annuelle, compte de la comptabilité centralisée des matières nucléaires correspondant à un des lieux mentionnés à l’article 12 ;
- déclarant comptable : en application de l’article R. 1333-11, II du code de la défense, toute personne exerçant une activité d’élaboration, de détention, de transfert, d’utilisation des matières nucléaires ;
- matières nucléaires : les matières et les composés chimiques définis à l’article R. 1333-1 du code de la défense. Le présent arrêté ne s’applique pas aux matières nucléaires qui sont affectées aux moyens nécessaires à la mise en œuvre de la politique de dissuasion ;
- ministre compétent : le ministre chargé de délivrer les autorisations, recevoir les déclarations et assurer le contrôle des matières nucléaires et activités associées, désigné par l’article R. 1333-3 du code de la défense ;
- stock physique : stock de matières nucléaires, selon les données du suivi physique ;
- stock comptable : stock de matières nucléaires, selon les données de la comptabilité ;
- transfert : activité associée à des matières nucléaires, au sens de l’article R. 1333-3 du code de la défense, consistant au déplacement juridique ou physique de matières nucléaires conduisant à un transfert de propriété ou de la responsabilité de leur sécurité nucléaire entre des opérateurs, ou entre des activités réalisées au sein de périmètres d’autorisation différents ;
- zone comptable : dans le cas où la déclaration est de périodicité journalière, une zone susceptible de contenir des matières nucléaires et dans laquelle toute opération affectant le stock de matières est enregistrée dans la comptabilité locale du déclarant comptable.
Art. 4. – Le déclarant comptable est responsable de la protection de ses matières nucléaires contre la perte, le vol, le détournement et tout autre acte de malveillance.
Il est soumis à une obligation de déclaration comptable auprès de la comptabilité centralisée des matières nucléaires, tenue par l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), pour le compte des ministres compétents. A ce titre, lorsqu’il est concerné, le déclarant comptable lui transmet les déclarations comptables, les rapports comptables établis au titre du règlement Euratom 302/2005 et les autres informations prévues par le présent arrêté.
Il tient à la disposition du ministre compétent le texte mentionné aux articles 10 et 25 concernant le préposé à la garde des matières nucléaires.
Le non-respect des dispositions prévues par le présent arrêté est puni dans les conditions prévues à l’article R. 1333-78 du code de la défense.
Art. 5. – Est soumise à une obligation de déclaration comptable annuelle toute personne qui détient, pour une activité donnée exercée sur un même lieu, des matières nucléaires en quantités suivantes :
- pour le plutonium : moins de 1 g de plutonium ;
- pour l’uranium enrichi à 20 % ou plus en uranium 235 : moins de 1 g d’uranium 235 contenu ;
- pour l’uranium enrichi à moins de 20 % en uranium 235 : moins de 1 g d’uranium 235 contenu ;
- pour l’uranium 233 : moins de 1 g d’uranium 233 contenu ;
- pour l’uranium naturel : 100 kg d’uranium total ou moins ;
- pour l’uranium appauvri : 350 kg d’uranium total ou moins ;
- pour le thorium à l’exception des alliages contenant moins de 5 % en masse de thorium : 200 kg de thorium total ou moins.
Art. 6. – Est soumise à une obligation de déclaration comptable journalière toute personne qui détient sur un même lieu, plus de :
- pour l’uranium naturel : 100 kg d’uranium total ;
- pour l’uranium appauvri : 350 kg d’uranium total ;
- pour le thorium, à l’exception des alliages contenant moins de 5 % en masse de thorium : 200 kg de thorium total.
Dès lors qu’une des matières nucléaires qu’il détient dépasse l’un des seuils ci-dessus, un détenteur est soumis à l’obligation de déclaration comptable journalière pour l’ensemble des matières nucléaires mentionnées à l’article 28.
TITRE II
DISPOSITIONS APPLICABLES AUX DÉCLARANTS COMPTABLES DE PÉRIODICITÉ ANNUELLE
Art. 7. – Le présent titre s’applique aux déclarants comptables soumis à une périodicité annuelle. Il précise les obligations de déclaration initiale, de suivi physique, de contrôles internes et avant expédition, de comptabilité locale, d’inventaire physique annuel, de déclaration annuelle, d’archivage, d’alerte en cas d’acte malveillant, de contrôle avant la cessation d’une activité et de contrôle par l’Etat.
Art. 8. – I. – Avant tout exercice d’une activité mettant en œuvre une matière nucléaire, le déclarant comptable établit, pour chaque lieu, une déclaration initiale mentionnant :
1° Les coordonnées du déclarant comptable ou, lorsqu’il s’agit d’une personne morale, sa raison sociale ou sa dénomination, son siège et les coordonnées de son représentant, ainsi que les coordonnées du ou des préposés à la garde des matières nucléaires et de l’interlocuteur privilégié à contacter pour toute question concernant les déclarations comptables ;
2° La nature des activités exercées et l’adresse du lieu où les matières déclarées sont physiquement détenues ;
3° Le cas échéant, les stocks initiaux de matières nucléaires et leur origine.
La déclaration initiale est adressée à la comptabilité centralisée des matières nucléaires, qui en accuse réception et informe le déclarant comptable de la ou les références des comptes le concernant.
II. – Le déclarant comptable informe sans délai la comptabilité centralisée de toute modification affectant des informations contenues dans la déclaration initiale.
Art. 9. – Le déclarant comptable assure un suivi physique des matières nucléaires qu’il détient, permettant de connaître à tout moment leur localisation et de tracer les transformations qu’elles ont subies ainsi que tous leurs mouvements.
Le suivi physique permet de renseigner la comptabilité locale dans les conditions prévues à l’article 13.
Art. 10. – Le déclarant comptable nomme au moins un préposé à la garde des matières nucléaires, après l’avoir avisé des obligations auxquelles ce dernier est soumis et des peines encourues en lui remettant deux exemplaires du texte de l’article L. 1333-13 du code de la défense.
En application de l’article R. 1333-76 du même code, il lui fait apposer, sur ces deux exemplaires, la date et la mention manuscrite qu’il en a pris connaissance. Le préposé restitue au déclarant comptable un des exemplaires et conserve le second.
Pour assurer la fonction en cas d’absence du préposé, le déclarant comptable nomme également un ou plusieurs suppléants, selon le même processus. Il dispose des mêmes missions et pouvoirs.
Le préposé à la garde des matières nucléaires :
- s’assure qu’un suivi physique des matières nucléaires est réalisé en interne ;
- s’assure que les personnes ayant accès aux matières nucléaires y sont autorisées.
Art. 11. – Pour toute expédition de matières nucléaires :
- l’expéditeur informe le transporteur de la nature et de la quantité des matières qu’il lui confie ;
- l’expéditeur transmet au destinataire les informations utiles pour lui permettre de s’assurer qu’il a bien reçu les matières nucléaires qui lui étaient destinées ;
- le destinataire s’assure dans les meilleurs délais qu’il a bien reçu les matières nucléaires qui lui étaient destinées et fournit à l’expéditeur un justificatif de ce contrôle comportant la date de leur arrivée effective ;
- l’expéditeur demande au destinataire, au plus tard dans un délai de huit jours à compter de la date d’arrivée prévue, un justificatif de réception comportant la date de leur arrivée effective.
Art. 12. – Lorsque le déclarant comptable détient des matières nucléaires dans plusieurs lieux, une déclaration comptable spécifique est fournie pour chacun des lieux.
Chaque lieu correspond à un « compte déclarant » dans la comptabilité centralisée des matières nucléaires.
Art. 13. – Le déclarant comptable tient, dans un livre journal physique ou numérique, une comptabilité locale pour chacune des matières suivantes :
- thorium, à l’exception des alliages contenant moins de 5 % en masse de thorium ;
- uranium appauvri ;
- uranium naturel ;
- uranium enrichi à moins de 20 % en uranium 235 ;
- uranium enrichi à 20 % ou plus en uranium 235 ;
- uranium 233 ;
- plutonium.
Cette comptabilité distingue les matières irradiées et non irradiées au sens de l’article R. 1333-70 du code de la défense. Elle distingue également les matières nucléaires nécessaires à la défense de celles qui ne le sont pas.
Le déclarant comptable limite au strict nécessaire le nombre de personnes qui ont un droit d’accès et d’écriture dans le livre journal.
Le livre journal est archivé périodiquement.
Art. 14. – I. – Le livre journal comporte l’enregistrement chronologique de toute variation affectant quantitativement le stock de matières nucléaires ou sa répartition selon les types de matières nucléaires précisés à l’article 13, notamment :
- les mouvements externes, notamment les réceptions et expéditions ;
- les opérations internes, notamment les utilisations et les transformations ;
- les corrections et ajustements, résultats de mesure, calculs et estimations ;
- les écarts constatés au cours des inventaires physiques effectués ou à toute autre occasion. N’entraîne pas nécessairement de variation de stock comptable :
- un mouvement de matière nucléaire sans transfert de responsabilité de la détention de la matière concernée ;
- un mouvement aller-retour de matière nucléaire, en dehors d’un lieu au sens de l’article 12, d’une durée inférieure à vingt-quatre heures et n’affectant pas ses caractéristiques ;
- un mouvement de matière nucléaire portant sur une masse strictement inférieure à 0,5 mg pour le plutonium, le tritium et l’uranium 233, et 0,5 g pour une autre matière nucléaire.
Le déclarant comptable dispose des justifications techniques de ces variations.
II. – L’enregistrement chronologique contient, pour chaque variation de stock, les informations suivantes :
- la date à laquelle la variation concernée a eu lieu ;
- la date de son enregistrement dans le livre journal ;
- la nature de la variation enregistrée ;
- dans le cas d’une variation de type mouvement, la référence de la zone comptable ou du compte déclarant dans la comptabilité centralisée des matières nucléaires, ou à défaut, l’identité et l’adresse de l’expéditeur et du destinataire ;
- les masses de matières nucléaires concernées, incluant la masse d’uranium 235 pour l’uranium enrichi et le stock total cumulé résultant ;
- la forme physico-chimique de la matière concernée ;
- l’identification de l’article, du lot ou du conteneur ;
- le nombre d’articles concernés ;
- l’information sur les obligations liées à un accord international.
Un enregistrement n’est pas modifiable. Toute correction fait l’objet d’un enregistrement où la référence à l’écriture initiale corrigée est indiquée.
III. – L’unité de compte utilisée est le gramme. Les variations affectant les stocks sont enregistrées :
- au gramme près pour le lithium enrichi en lithium 6, le thorium, l’uranium appauvri, l’uranium naturel et l’uranium enrichi ainsi que pour le plutonium contenu dans du combustible mis en œuvre dans un réacteur de production d’énergie nucléaire ;
- au milligramme pour l’uranium 233, le tritium et le plutonium ne répondant pas aux conditions mentionnées à l’alinéa précédent.
Les valeurs peuvent être arrondies à l’unité inférieure si la première décimale est 0, 1, 2, 3 ou 4 et à l’unité supérieure si la première décimale est 5, 6, 7, 8 ou 9.
Art. 15. – Le déclarant comptable procède annuellement à un inventaire physique des matières nucléaires détenues afin de s’assurer de la conformité des stocks comptables avec les stocks physiques existants.
Cet inventaire porte sur les matières nucléaires détenues le 31 décembre de l’année n. Sauf impossibilité, l’inventaire fait l’objet d’une vérification par une personne différente de celle qui a effectué la prise d’inventaire. Il est réalisé soit à partir d’une liste d’articles issue du système de suivi, en vérifiant la cohérence de cette liste avec les articles présents, soit en relevant les articles présents et en vérifiant la cohérence de ce relevé avec les données de suivi physique.
L’inventaire vise à déceler toute disparition ou toute présence inattendue de matières nucléaires.
Lors de l’inventaire, le déclarant comptable vérifie la cohérence des données de l’inventaire avec :
- les données de suivi physique ;
- les données du livre journal ;
- les déclarations comptables.
La saisie d’inventaire et la vérification sont formalisées, datées et signées.
Art. 16. – A l’issue de cet inventaire, le déclarant comptable dresse une déclaration annuelle de ses activités nucléaires, où figurent :
- ses noms, prénoms et adresse ou, lorsqu’il s’agit d’une personne morale, sa raison sociale ou sa dénomination, son siège et les noms, prénoms et qualité de son mandataire social ou de son principal dirigeant ainsi que les noms, prénoms et qualité du représentant qu’elle aura désigné pour l’application de la réglementation ;
- l’adresse du lieu où les matières nucléaires sont physiquement détenues ;
- les noms, prénoms et qualité tout personne qu’elle aura désignée comme préposé à la garde des matières nucléaires ;
- le report de l’inventaire physique annuel ;
- le report du livre journal.
Cette déclaration est réalisée avec l’unité de compte définie au III de l’article 14. Elle est transmise avant le 31 janvier de l’année n+1 à la comptabilité centralisée des matières nucléaires par voie électronique.
Art. 17. – Les documents de saisie d’inventaire physique ainsi que les enregistrements comptables et les justificatifs techniques s’y rapportant sont conservés par le déclarant comptable pendant cinq ans.
Art. 18. – En cas d’acte de malveillance ou de perte de matière, le déclarant comptable informe dès qu’il en a la connaissance et au plus tard dans les vingt-quatre heures suivant cette constatation, les services de police et de gendarmerie territorialement compétents, le représentant de l’Etat dans le département du lieu de survenance ainsi que le ministre compétent, et collabore avec eux.
Art. 19. – Avant de cesser sur un lieu une activité mettant en œuvre les matières nucléaires affectées à son compte déclarant, le déclarant comptable, s’assure que ce lieu ne contient plus de matières nucléaires.
Pour cela il contrôle ses informations de suivi physique et de comptabilité. Il résout tout écart. Il établit un justificatif de l’évacuation des matières nucléaires.
Il effectue une vérification physique de tous les locaux dans lesquels pourraient être présentes des matières nucléaires.
Il s’assure également auprès de la comptabilité centralisée qu’il n’y a plus de matière nucléaire déclarée dans le compte déclarant concerné.
A l’issue de ces contrôles, et après avoir le cas échéant pris les dispositions nécessaires, le déclarant comptable demande à la comptabilité centralisée la clôture de son compte. Sans réponse contraire sous deux mois le compte est fermé. Il reste soumis aux obligations du présent arrêté jusqu’à l’accomplissement de la déclaration annuelle prévue à l’article 16 pour l’année de fermeture du compte.
Art. 20. – Le déclarant comptable tient tous les documents mentionnés au présent arrêté à disposition du ministre compétent et des inspecteurs mentionnés à l’article L. 1333-5 du code de la défense.
Art. 21. – Dans les lieux placés directement sous l’autorité du ministre de la défense, les opérations mentionnées aux articles 9, 13, 14 et 15 peuvent être effectuées sur la base des données issues du suivi comptable mis en œuvre par ce ministre pour les matériels de la défense.
TITRE III
DISPOSITIONS APPLICABLES AUX DÉCLARANTS COMPTABLES DE PÉRIODICITÉ JOURNALIÈRE
Art. 22. – Le présent titre s’applique aux déclarants comptables soumis à une périodicité journalière. Il précise les obligations de déclaration initiale, de suivi physique, de contrôles internes et avant expédition, de comptabilité locale, de déclaration journalière, de récolement mensuel, d’inventaire physique annuel, de déclaration annuelle, d’archivage, d’alerte en cas d’acte de malveillance, de contrôle avant la cessation d’une activité et de contrôle par l’Etat.
Art. 23. – I. – Avant tout exercice d‘une activité mettant en œuvre une matière nucléaire, le déclarant comptable établit, pour chaque zone comptable, une déclaration initiale mentionnant :
1° Les coordonnées du déclarant comptable ou, lorsqu’il s’agit d’une personne morale, sa raison sociale ou sa dénomination, son siège et les coordonnées de son représentant, ainsi que les coordonnées du ou des préposés à la garde des matières nucléaires et de l’interlocuteur privilégié à contacter pour toute question concernant la déclaration ;
2° La nature des activités exercées et l’adresse du lieu où les matières déclarées sont physiquement détenues ;
3° Le cas échéant, les stocks initiaux de matières nucléaires et leur origine ;
4° L’annexe 2 complétée.
La déclaration initiale est adressée à la comptabilité centralisée des matières nucléaires, qui en accuse réception et informe le déclarant comptable de la ou les références des comptes le concernant.
II. – Le déclarant comptable informe sans délai la comptabilité centralisée de toute modification affectant des informations contenues dans la déclaration initiale.
Art. 24. – Le déclarant comptable assure un suivi physique des matières nucléaires qu’il détient, permettant de connaître à tout moment leur localisation et de tracer les transformations qu’elles ont subies ainsi que tous leurs mouvements.
Le suivi physique permet de renseigner la comptabilité locale dans les conditions prévues à l’article 27.
Art. 25. – Le déclarant comptable nomme au moins un préposé à la garde des matières nucléaires, après l’avoir avisé des obligations auxquelles ce dernier est soumis et des peines encourues en lui remettant deux exemplaires du texte de l’article L. 1333-13 du code de la défense.
En application de l’article R. 1333-76 du même code, il lui fait apposer, sur ces deux exemplaires, la date et la mention manuscrite qu’il en a pris connaissance. Le préposé restitue au déclarant comptable un des exemplaires et conserve le second.
Pour assurer la fonction en cas d’absence du préposé, le déclarant comptable nomme également un ou plusieurs suppléants, selon le même processus. Il dispose des mêmes missions et pouvoirs.
Le préposé à la garde des matières nucléaires :
- s’assure qu’un suivi physique des matières nucléaires est réalisé en interne ;
- s’assure que les personnes ayant accès aux matières nucléaires y sont autorisées.
Art. 26. – Pour toute expédition de matières nucléaires :
- l’expéditeur vérifie préalablement que le destinataire est enregistré par la comptabilité centralisée des matières nucléaires ;
- l’expéditeur informe le transporteur de la nature et de la quantité des matières qu’il lui confie ;
- l’expéditeur transmet au destinataire les informations utiles pour lui permettre de s’assurer qu’il a bien reçu les matières nucléaires qui lui étaient destinées ;
- le destinataire vérifie que l’expéditeur est enregistré auprès de la comptabilité centralisée ;
- le destinataire s’assure dans les meilleurs délais qu’il a bien reçu les matières nucléaires qui lui étaient destinées et fournit à l’expéditeur un justificatif de ce contrôle comportant la date de leur arrivée effective ;
- l’expéditeur demande au destinataire, au plus tard dans un délai de huit jours à compter de la date d’arrivée prévue, un justificatif de réception comportant la date de leur arrivée effective.
Art. 27. – Lorsque le déclarant comptable détient des matières nucléaires dans des zones distinctes, une déclaration comptable spécifique est fournie pour chacune d’elles.
Chaque zone est appelée « zone comptable ».
Art. 28. – Le déclarant comptable tient, dans un livre journal physique ou numérique, une comptabilité locale pour chacune des matières suivantes :
- thorium, à l’exception des alliages contenant moins de 5 % en masse de thorium ;
- uranium appauvri ;
- uranium naturel ;
- uranium enrichi à moins de 20 % en uranium 235 ;
- uranium enrichi à 20 % ou plus en uranium 235 ;
- uranium 233 ;
- plutonium.
Cette comptabilité distingue les matières irradiées et non irradiées au sens de l’article R. 1333-70 du code de la défense. Elle distingue également les matières nucléaires nécessaires à la défense de celles qui ne le sont pas.
Le déclarant comptable limite au strict nécessaire le nombre de personnes qui ont un droit d’accès et d’écriture dans le livre journal.
Le livre journal est archivé périodiquement.
Art. 29. – I. – Le livre journal comporte l’enregistrement chronologique de toute variation affectant quantitativement le stock de matières nucléaires ou sa répartition selon les types de matières nucléaires précisés à l’article 28, notamment :
- les mouvements externes, notamment les réceptions et expéditions ;
- les opérations internes, notamment les utilisations et les transformations ;
- les corrections et ajustements, résultats de mesure, calculs et estimations ;
- les écarts constatés au cours des inventaires physiques effectués ou à toute autre occasion. N’entraîne pas nécessairement de variation de stock comptable :
- un mouvement de matière nucléaire sans transfert de responsabilité de la détention de la matière concernée ;
- un mouvement aller-retour de matière nucléaire en dehors d’une zone comptable, d’une durée inférieure à vingt-quatre heures et n’affectant pas ses caractéristiques ;
- un mouvement de matière nucléaire portant sur une masse strictement inférieure à 0,5 mg pour le plutonium, le tritium et l’uranium 233, et 0,5 g pour une autre matière nucléaire.
Le déclarant comptable dispose des justifications techniques de ces variations.
II. – L’enregistrement chronologique contient, pour chaque variation de stock, les informations suivantes :
- la date à laquelle la variation concernée a eu lieu ;
- la date de son enregistrement dans le livre journal ;
- la nature de la variation enregistrée ;
- dans le cas d’une variation de type mouvement, la référence de la zone comptable ou du compte déclarant dans la comptabilité centralisée des matières nucléaires, ou à défaut, l’identité et l’adresse de l’expéditeur et du destinataire ;
- les masses de matières nucléaires concernées, incluant la masse d’uranium 235 pour l’uranium enrichi et le stock total cumulé résultant ;
- la forme physico-chimique de la matière concernée ;
- l’identification de l’article, du lot ou du conteneur ;
- le nombre d’articles concernés ;
- l’information sur les obligations liées à un accord international.
Un enregistrement n’est pas modifiable. Toute correction fait l’objet d’un enregistrement où la référence à l’écriture initiale corrigée est indiquée.
III. – Les variations de stock sont enregistrées le jour même où elles sont constatées sur la base des documents permettant d’assurer leur traçabilité transmis par les personnes en charge du suivi physique. En préalable à leur enregistrement, le déclarant comptable effectue un contrôle de cohérence des informations issues du suivi physique ou fournies par l’expéditeur des matières.
Pour les variations déterminées par calculs ou par analyses, l’enregistrement a lieu le jour où le résultat est connu.
Dans le cas de variations résultant de la détection d’un écart entre la réalité physique et la comptabilité, l’enregistrement est réalisé dans les huit jours suivant leur détection.
IV. – L’unité de compte utilisée est le gramme. Les variations affectant les stocks sont enregistrées :
- au gramme près pour le lithium enrichi en lithium 6, le thorium, l’uranium appauvri, l’uranium naturel et l’uranium enrichi ainsi que pour le plutonium contenu dans du combustible mis en œuvre dans un réacteur de production d’énergie nucléaire ;
- au milligramme pour l’uranium 233, le tritium et le plutonium ne répondant pas aux conditions mentionnées à l’alinéa précédent.
Les valeurs peuvent être arrondies à l’unité inférieure si la première décimale est 0, 1, 2, 3 ou 4 et à l’unité supérieure si la première décimale est 5, 6, 7, 8 ou 9.
V. – Au plus tard le troisième jour ouvré du mois suivant, le stock comptable à la date du dernier jour du mois écoulé est calculé, à partir des variations de stocks du mois et de l’enregistrement des stocks du mois précédent, enregistré dans le livre journal et fait l’objet d’un arrêté comptable.
Tout enregistrement ultérieur de variation, quelle que soit la date de l’opération physique, est rattaché au mois suivant le dernier arrêté comptable.
Art. 30. – Le déclarant comptable transmet le jour même à la comptabilité centralisée des matières nucléaires les données comptables relatives à tout enregistrement dans le livre journal.
Ces données sont transmises par voie électronique, avec l’ensemble des informations mentionnées à l’annexe 1 qui sont pertinentes.
Art. 31. – Chaque mois, la comptabilité centralisée des matières nucléaires transmet au déclarant comptable un état récapitulatif des stocks comptables et des variations qui lui ont été déclarées.
Le déclarant comptable réalise un récolement entre les données figurant dans cet état avec les enregistrements et les stocks comptables de la comptabilité locale.
Le résultat de ce récolement est transmis à la comptabilité centralisée des matières nucléaires dans les douze jours ouvrés qui suivent la réception de cet état.
Indépendamment, le cas échéant, de l’alerte des autorités en application de l’article 34, tous les écarts détectés ainsi que les explications associées y sont mentionnés.
Art. 32. – Le déclarant comptable procède annuellement à un inventaire physique des matières nucléaires détenues afin de s’assurer de la conformité des stocks comptables avec les stocks physiques existants.
Sauf impossibilité, l’inventaire fait l’objet d’une vérification par une personne différente de celle qui a effectué la prise d’inventaire Il est réalisé soit à partir d’une liste d’articles issue du système de suivi, en vérifiant la cohérence de cette liste avec les articles présents, soit en relevant les articles présents et en vérifiant la cohérence de ce relevé avec les données de suivi physique.
L’inventaire vise à déceler toute disparition ou toute présence inattendue de matières nucléaires. Lors de l’inventaire, le déclarant comptable vérifie la cohérence des données de l’inventaire avec :
- les données de suivi physique ;
- les données du livre journal ;
- les déclarations comptables.
La saisie d’inventaire et la vérification sont formalisées, datées et signées.
Art. 33. – Les documents de saisie d’inventaire physique ainsi que les enregistrements comptables et les justificatifs techniques s’y rapportant sont conservés par le déclarant comptable pendant cinq ans.
Art. 34. – En cas d’acte de malveillance ou de perte de matière, le déclarant comptable informe dès qu’il en a la connaissance et au plus tard dans les vingt-quatre heures suivant cette constatation, les services de police et de gendarmerie territorialement compétents, le représentant de l’Etat dans le département du lieu de survenance ainsi que le ministre compétent, et collabore avec eux.
Art. 35. – Avant de cesser sur un lieu une activité mettant en œuvre des matières nucléaires dans une zone comptable, le déclarant comptable s’assure que la zone comptable ne contient plus de matières nucléaires.
Pour cela il contrôle ses informations de suivi physique et de comptabilité. Il résout tout écart. Il établit un justificatif de l’évacuation des matières nucléaires. Il réalise une vérification physique de tous les locaux dans lesquels pourraient être présentes des matières nucléaires.
Il s’assure également auprès de la comptabilité centralisée qu’il n’y a plus de matière nucléaire déclarée pour cette zone comptable.
A l’issue de ces contrôles, et après avoir le cas échéant pris les dispositions nécessaires, le déclarant comptable demande à la comptabilité centralisée la clôture de son compte. Sans réponse contraire sous deux mois le compte est fermé.
Il reste soumis aux obligations du présent arrêté jusqu’à l’accomplissement du récolement mensuel, prévu à l’article 31, pour le mois de demande de fermeture du compte.
Art. 36. – Le déclarant comptable tient tous les documents mentionnés au présent arrêté à disposition du ministre compétent et des inspecteurs mentionnés à l’article L. 1333-5 du code de la défense.
TITRE IV
DISPOSITIONS FINALES
Art. 37. – Le présent arrêté entre en vigueur le lendemain de sa publication.
Art. 38. – I. – Les personnes qui sont soumises à déclaration comptable de périodicité annuelle à la date d’entrée en vigueur du présent arrêté, et qui ne l’étaient pas antérieurement, mettent en œuvre les dispositions prévues au présent arrêté à partir du 1er janvier 2024.
Elles adressent la déclaration initiale prévue à l’article 8 au plus tard le 1er janvier 2024. Elles adressent la première déclaration annuelle au plus tard le 31 janvier 2025.
II. – Les personnes qui sont soumises à déclaration comptable de périodicité journalière à la date d’entrée en vigueur du présent arrêté, et qui étaient préalablement soumises à l’arrêté du 31 mai 2011 relatif aux mesures de suivi physique, de comptabilité et de protection physique applicables aux matières nucléaires faisant l’objet d’une déclaration ainsi qu’a la forme et aux modalités de la déclaration :
- mettent en œuvre soit les dispositions prévues au titre 2, soit celles prévues au titre 3, à partir de la date d’entrée en vigueur du présent arrêté ;
- mettent en œuvre les dispositions prévues au titre 3 à partir du 1er janvier 2024.
III. – Les personnes qui sont soumises à déclaration comptable de périodicité journalière à la date d’entrée en vigueur du présent arrêté, et qui n’étaient pas soumises à déclaration à cette date, mettent en œuvre les dispositions prévues au présent arrêté à partir du 1er janvier 2024.
Elles adressent la déclaration initiale prévue à l’article 23 au plus tard le 1er janvier 2024.
Art. 39. – L’arrêté du 31 mai 2011 relatif aux mesures de suivi physique, de comptabilité et de protection physique applicables aux matières nucléaires faisant l’objet d’une déclaration ainsi qu’à la forme et aux modalités de la déclaration est abrogé à la date à la date d’entrée en vigueur du présent arrêté.
Art. 40. – Le directeur du cabinet civil et militaire du ministre des armées et le chef du service du haut- fonctionnaire de défense et de sécurité de la ministre chargée de l’énergie sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l’exécution du présent arrêté, qui sera publié au
Journal officiel de la République française.
Fait le 27 décembre 2022.
La ministre de la transition énergétique,
Pour la ministre et par délégation :
Le chef du service du haut-fonctionnaire de défense et de sécurité,
M. PAIN
Le ministre des armées,
Pour le ministre et par délégation :
Le directeur du cabinet civil et militaire,
P. Gustin
ANNEXE 1
LISTE DES INFORMATIONS DE DECLARATION COMPTABLE JOURNALIERE
ANNEXE 2
FICHE ZONE COMPTABLE
Source Légifrance