Avis du 3 avril 2025 aux fabricants, importateurs, distributeurs, vendeurs, loueurs et utilisateurs de chargeurs frontaux montés sur un tracteur agricole ou forestier
NOR :
AGRS2510365V
Le présent avis a pour objet de rappeler la réglementation applicable et de présenter les mesures attendues concernant la conception et l’utilisation des chargeurs frontaux, suite à la décision d’exécution (UE) 2024/1256 de la Commission du 26 avril 2024
modifiant et corrigeant la décision d’exécution (UE) 2023/1586 en ce qui concerne les normes harmonisées relatives aux engins agricoles à chargeur frontal, aux quads tout-terrain et aux outils portatifs à moteur électrique, publiée au
Journal officiel de l’Union européenne le 30 avril 2024.
Il précise les mesures attendues de la part des différents opérateurs économiques (fabricants, importateurs, distributeurs, vendeurs, loueurs) mettant à disposition sur le marché des chargeurs frontaux et des employeurs utilisateurs de ce type de machines.
1.Contexte
Les chargeurs frontaux sont le plus souvent des équipements interchangeables au sens de la directive 2006/42/CE du 17 mai 2006 relative aux machines. Ils peuvent être montés et démontés sur un tracteur agricole ou forestier par l’opérateur. Ils sont considérés comme des machines lorsqu’ils sont installés à demeure sur des tracteurs agricoles ou forestiers.
La plupart des chargeurs frontaux sont équipés d’un dispositif d’attache permettant d’installer différents outils, équipements interchangeables ou appareils de levage (fourche, crochet…) leur conférant ainsi une fonction pour réaliser des opérations de levage au sens de la directive du 17 mai 2006 précitée. Le point 4.1.1
a de son annexe I définit l’opération de levage comme une : «
opération de déplacement de charges unitaires composées d’objets et/ou de personnes nécessitant, à un moment donné, un changement de niveau ». Cependant, il n’a pas pour fonction le levage de personnes. Il est donc interdit d’utiliser le chargeur frontal à cette fin, sauf en cas d’urgence comme prévu par l’article L. 4323-32 du code du travail.
Certains chargeurs frontaux équipés de façon permanente d’un godet sont exclusivement destinés à des opérations de manipulation de charges en vrac (fumier, grain, terre, sable…). Celles-ci ne sont pas considérées comme des opérations de levage mais comparables à des opérations de terrassement.
Selon leur masse et leur catégorie, les tracteurs agricoles ou forestiers sont équipés d’une structure de protection contre le retournement (SPCR ou
ROPS en anglais pour
roll-over protective structure). Celle-ci peut se présenter sous la forme d’un arceau monté à l’avant ou à l’arrière du poste de conduite ou d’une structure à quatre montants, souvent intégrée à la cabine du tracteur. Cette structure a pour fonction de protéger le conducteur du tracteur lors d’un renversement ou d’un retournement, sous réserve que celui-ci ait bouclé sa ceinture de sécurité, en préservant un volume limite de déformation autour de lui.
De manière optionnelle, les tracteurs peuvent être équipés d’une structure de protection contre les chutes d’objets (SPCO ou
FOPS en anglais pour
falling objects protective structure). Cette structure doit être vérifiée selon les dispositions de l’annexe XI du règlement délégué (UE) n° 1322/2014 du 19 septembre 2014,
complétant et modifiant le règlement (UE) n° 167/2013, ou du code 10 des codes tracteurs de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).
Plusieurs accidents de travail graves ou mortels occasionnés par la chute de balles de fourrage ont conduit l’Allemagne à remettre en question la norme harmonisée EN 12525 : 2000 + A2 : 2010 relative aux chargeurs frontaux, en expliquant que celle-ci ne satisfaisait pas aux exigences essentielles de santé et de sécurité (EESS) énoncées aux points 1.1.2 et 1.7.4.2 (l) de l’annexe I de la directive du 17 mai 2006 précitée.
Après consultation des Etats membres, des différentes parties prenantes et du comité européen de normalisation (CEN), la Commission a conclu que la norme ne satisfaisait pas aux EESS énoncées aux points 1.1.2 et 1.7.4.2 (l) de l’annexe I de la directive du 17 mai 2006 précitée.
La norme reste harmonisée à la directive du 17 mai 2006 précitée mais avec la restriction suivante :
« La présente norme harmonisée ne confère pas de présomption de conformité aux exigences essentielles de santé et de sécurité énoncées au point 1.1.2 de l’annexe I de la directive 2006/42/CE, qui exige des mesures techniques, et non [à] des mesures organisationnelles telles que des structures de protection atténuant spécifiquement les chutes au
lieu de traiter d’autres scénarios d’accident, y compris les événements de renversement de véhicule, et au point 1.7.4,2 l) de l’annexe I de la directive 2006/42/CE, qui exige des informations sur les risques résiduels qui subsistent malgré les mesures de conception sûres, de sauvegarde et de protection complémentaires adoptées. »
2. Conséquences
La norme harmonisée EN 12525 : 2000 + A2 : 2010 ne donne plus de présomption de conformité à certaines exigences essentielles de la directive du 17 mai 2006 précitée mais elle continue d’exister et peut être utilisée par les fabricants lors de la conception.
Les fabricants ne peuvent plus s’appuyer uniquement sur cette norme pour mettre sur le marché européen les chargeurs frontaux mais doivent s’assurer du respect des dispositions pertinentes de la directive du 17 mai 2006 précitée, en particulier les EESS 1.1.2 et 1.7.4,2 l de l’annexe I. Les fabricants doivent revoir leur évaluation des risques, choisir des mesures de protection adéquates pour traiter les risques concernés et justifier leurs choix dans le dossier technique.
Il n’est pas envisagé de considérer que tous les chargeurs frontaux déjà en service sont non conformes à la règlementation en vigueur du fait de la restriction de la norme. Chaque modèle de chargeur frontal devra faire l’objet d’un examen afin de vérifier s’il est ou non conforme aux dispositions applicables au moment de sa mise sur le marché, particulièrement s’agissant des dispositions imposant de prévenir toute chute d’objets présentant un risque pour le conducteur.
Parallèlement à la procédure d’objection formelle, les travaux de révision de la norme ont été lancés fin 2022 sans attendre les conclusions de la Commission.
3. Rappel de la réglementation applicable
Les chargeurs frontaux constituent des machines (la directive du 17 mai 2006 précitée s’applique aux équipements interchangeables) et donc des équipements de travail au sens de l’article L. 4311-2 du code du travail.
Les chargeurs frontaux en service doivent être conformes aux règles de conception en vigueur au moment de leur mise sur le marché en application de l’article L. 4321-2 du code du travail.
La version actuellement en vigueur de ces dispositions est issue de l’annexe I de la directive du 17 mai 2006 précitée, transposée en droit français par le décret n° 2008-1156 du 7 novembre 2008. Cette réglementation est entrée en application le 29 décembre 2009. Toutes les machines mises sur le marché à l’état neuf à compter de cette date doivent donc être conformes à ces dispositions.
Les chargeurs frontaux mis en service avant l’entrée en vigueur de la directive du 17 mai 2006 précitée doivent être conformes :
- soit à la directive 98/37/CE du 22 juin 1998 concernant le rapprochement des législations des États membres relatives aux machines pour ceux mis sur le marché entre le 1er janvier 1993 et le 31 décembre 1994 ;
- soit aux prescriptions relatives à l’utilisation des équipements de travail pour ceux mis sur le marché antérieurement au 1er janvier 1993 (articles R. 4324-1 et suivants du code du travail).
a) Obligation des fabricants, importateurs, distributeurs, vendeurs ou loueurs
En application de l’article L. 4311-3 du code du travail, il est interdit d’exposer, de mettre en vente, de vendre, d’importer, de louer, de mettre à disposition ou de céder à quelque titre que ce soit des équipements de travail ne répondant pas aux règles techniques de conception en vigueur, c’est à dire aux dispositions de l’annexe I prévue à l’article R. 4312-1 du code du travail.
Le non-respect de ces dispositions constitue un délit prévu et sanctionné à l’article L. 4741-9 du code du travail. Conformément à l’article R. 4312-2 du code du travail, les machines d’occasion, soumises lors de leur mise en service à l’état neuf aux règles techniques de conception et de construction prévues à l’annexe I de
l’article R. 4312-1, demeurent soumises aux règles de cette annexe. Les machines d’occasion qui n’étaient pas soumises à ces règles lors de leur mise en service à l’état neuf sont soumises aux prescriptions techniques d’utilisation prévues aux articles R. 4324-1 et suivants du code du travail.
b) Obligation des employeurs utilisateurs
L’article L. 4321-2 interdit de mettre en service ou d’utiliser des équipements de travail et des moyens de protection qui ne répondent pas aux règles techniques de conception applicables, c’est à dire aux dispositions de l’annexe I mentionnée à l’article R. 4312-1 du code du travail.
Le non-respect de ces dispositions constitue un délit prévu et sanctionné à l’article L. 4741-9 du code du travail. Conformément aux dispositions de l’article R. 4322-1 du code du travail, les équipements de travail doivent être maintenus en conformité avec les règles techniques de conception et de construction applicables lors de leur mise
en service dans l’établissement, y compris au regard de la notice d’instructions.
Les machines non soumises aux règles de conception lors de leur mise sur le marché doivent être en conformité avec les prescriptions d’utilisation des équipements de travail prévues aux articles R. 4324-1 et suivants du code du travail. Le cas échant, elles doivent avoir été mises en conformité avec la version actuellement en vigueur de ces dispositions.
En particulier, pour le risque considéré de chutes d’objets, l’article R. 4324-32 prévoit
: « Lorsque le risque de chute d’objets ne peut pas être complètement évité, l’équipement de travail mobile est équipé d’une structure de protection contre ce risque. »
Par ailleurs les employeurs utilisateurs doivent s’assurer régulièrement du bon fonctionnement des dispositifs de sécurité du chargeur frontal, en particulier lors des vérifications générales périodiques réalisées tous les 6 mois si le chargeur frontal est utilisé pour des opérations de levage ; celles-ci sont prévues par l’article R. 4323-23 du code du travail et l’arrêté du 1er mars 2004 relatif aux vérifications des appareils et accessoires de levage. Ces obligations s’intègrent dans le cadre du principe de maintien en état de conformité prévu aux articles R. 4322-1 et -2 du code du travail.
c) Cause de résolution
Il est rappelé que l’employeur ayant acheté ou loué un chargeur frontal qui s’avère non conforme peut, en application de l’article L. 4311-5 du code du travail, et nonobstant toute clause contraire, demander la résolution de la vente ou du bail dans le délai d’une année à compter du jour de la livraison.
Par ailleurs, il peut se voir accorder des dommages et intérêts par le tribunal qui prononce cette résolution.
4. Chargeurs frontaux neufs
Ce chapitre décrit les actions à mener lors de la conception et la construction des chargeurs frontaux. Il concerne également ceux présents dans la chaîne de distribution et non encore mis en service.
Les opérateurs économiques (fabricants, importateurs, mandataires, distributeurs) doivent agir chacun selon leur rôle.
a) Actions à la charge des fabricants de chargeurs frontaux
Depuis l’entrée en vigueur de la décision d’exécution (UE) de la Commission du 26 avril 2024, c’est-à-dire le jour de sa publication au
JOUE le 30 avril 2024, les fabricants doivent identifier les modèles de chargeurs frontaux présentant un risque de chute d’objets sur le conducteur du tracteur en examinant leurs évaluations des risques.
Les exemplaires de modèles de chargeurs frontaux présentant un risque lorsqu’ils sont associés avec certains tracteurs agricoles ou forestiers ne doivent plus être mis sur le marché par leurs fabricants tant que de nouveaux éléments de conception les rendant sûrs ne seront pas mis en œuvre.
Pour les exemplaires de modèles de chargeurs frontaux présentant un risque, présents dans la chaîne de distribution, ils doivent les retirer du marché. Ils ne pourront être remis sur le marché qu’après avoir été mis en conformité. Cette opération peut être réalisée dans les locaux du fabricant ou des distributeurs.
Afin d’accompagner les fabricants, des mesures techniques minimales sont présentées en annexe B en fonction de plusieurs situations possibles, permettant de mettre en conformité les chargeurs frontaux conformément à la réglementation. Les fabricants peuvent choisir toute autre solution présentant un niveau de sécurité au moins équivalent et permettant de répondre aux EESS. Ils doivent être en mesure de justifier leurs choix sur demande des services de contrôle habilités.
Les notices d’instructions devront être mises à jour en conséquence.
L’identification et le retrait du marché des chargeurs frontaux présentant un risque lorsqu’ils sont associés avec certains tracteurs agricoles ou forestiers doivent être effectifs au plus tard 6 mois après la date de publication du présent avis.
Ils doivent informer leurs distributeurs, vendeurs et loueurs au plus tard 3 mois après la date de publication du présent avis afin que ceux-ci retirent du marché les chargeurs frontaux non conformes.
b) Actions à la charge des importateurs
Les importateurs ne doivent plus mettre à disposition sur le marché les modèles de chargeurs frontaux présentant un risque. En se mettant en relation avec les fabricants et/ou en utilisant les documents à leur disposition, ils doivent être en mesure d’identifier les modèles concernés.
Ils doivent se coordonner avec les fabricants pour établir le cas échéant la procédure de mise en conformité de ces chargeurs (retour usine, modification en entrepôt…).
Le retrait du marché des chargeurs frontaux présentant un risque lorsqu’ils sont associés avec certains tracteurs agricoles ou forestiers doit être effectif au plus tard 6 mois après la date de publication du présent avis.
Ils doivent informer leurs distributeurs, vendeurs et loueurs au plus tard 3 mois après la date de publication du présent avis.
c) Actions à la charge des distributeurs, vendeurs et loueurs
Les distributeurs, les vendeurs et les loueurs ne doivent plus mettre à disposition sur le marché les modèles de chargeurs frontaux présentant un risque. En se mettant en relation avec les fabricants et les importateurs et/ou en utilisant les documents à leur disposition, ils doivent être en mesure d’identifier les modèles concernés.
Le retrait du marché des chargeurs frontaux présentant un risque lorsqu’ils sont associés avec certains tracteurs agricoles ou forestiers doit être effectif au plus tard 6 mois après la date de publication du présent avis.
Ils doivent se coordonner avec les fabricants et les importateurs pour établir la procédure de mise en conformité de ces chargeurs (retour usine, modification en entrepôt…).
En cas de refus de la part du fabricant ou de l’importateur, le distributeur peut transmettre un signalement au service de surveillance du marché.
5.Chargeurs frontaux mis en service
a) Actions à la charge des fabricants et importateurs de chargeurs frontaux
Ils doivent informer au plus tard 3 mois après la date de publication du présent avis leurs distributeurs, vendeurs et loueurs des risques possibles et interdire l’association d’un chargeur frontal avec un tracteur agricole ou forestier si les mesures techniques ne sont pas en place selon les cas décrits en annexe B.
L’application des mesures techniques doit couvrir les chargeurs frontaux mis en service depuis 10 ans avant la date de publication du présent avis.
Selon les possibilités techniques, ils doivent proposer aux distributeurs, vendeurs, loueurs et aux utilisateurs des solutions permettant de modifier le chargeur frontal. Ces modifications sont à la charge du fabricant, sauf s’il était bien précisé dans la notice d’instructions que l’association du chargeur frontal était impossible avec le tracteur concerné.
Si le constructeur n’est pas en mesure de proposer une solution technique permettant de modifier le chargeur frontal, il doit être échangé contre un chargeur frontal conforme à sa charge.
b) Actions à la charge des fabricants et importateurs de tracteurs agricoles ou forestiers.En fonction des avertissements figurant déjà dans le manuel d’utilisation, informer le cas échéant les distributeurs, vendeurs, loueurs et les utilisateurs des risques possibles et interdire l’association d’un chargeur frontal avec un tracteur agricole si le conducteur n’est pas protégé du risque de chute d’objets.
Certains fabricants et importateurs de tracteurs agricoles ou forestiers sont aussi fabricants ou importateurs de chargeurs frontaux. Le § 5
a s’applique aussi pour eux.
c) Actions à la charge des distributeurs, vendeurs et loueursLes distributeurs, vendeurs et loueurs doivent alerter les utilisateurs par tous les moyens à leur disposition (affichage, mailing…) au plus tard 6 mois après la date de publication du présent avis.
Ils doivent proposer une solution de mise en sécurité selon les prescriptions du fabricant ou de l’importateur. La mise en œuvre des mesures techniques prévue au 5
d doit être réalisée au plus tard 18 mois après la date de publication du présent avis.
d) Actions à la charge des employeurs utilisateursDès que les employeurs utilisateurs ont l’information sur le risque, ils ne doivent plus utiliser le chargeur frontal ou limiter son usage afin d’éviter le risque de chute d’objets et ce jusqu’à sa mise en sécurité.
L’annexe C présente les mesures que l’employeur est susceptible de prendre en fonction des différents cas de figure.
S’agissant des mesures techniques à prendre pour mettre en sécurité leur chargeur frontal, il est recommandé à l’employeur de s’adresser au fabricant, à l’importateur ou au distributeur de son chargeur frontal.
Les utilisateurs non employeurs sont invités à prendre les mêmes mesures pour leur propre sécurité.
La mise en sécurité des chargeurs frontaux présentant un risque doit être effective au plus tard 18 mois après la date de publication du présent avis.
ANNEXES
ANNEXE A
EXTRAITS DE L’ANNEXE 1 DE LA DIRECTIVE 2006/42/CE DU 17 MAI 2006 RELATIVE AUX MACHINES
1.1.2.
Principes d’intégration de la sécurité
a) La machine doit être conçue et construite pour être apte à assurer sa fonction et pour qu’on puisse la faire fonctionner, la régler et l’entretenir sans exposer quiconque à un risque lorsque ces opérations sont effectuées dans les conditions prévues par le fabricant, mais en tenant également compte de tout mauvais usage raisonnablement prévisible.
Les mesures prises doivent avoir pour objectif de supprimer tout risque durant la durée d’existence prévisible de la machine, y compris les phases de transport, de montage, de démontage, de mise hors service et de mise au rebut.
b) En choisissant les solutions les plus adéquates, le fabricant ou son mandataire doit appliquer les principes suivants, dans l’ordre indiqué :
- éliminer ou réduire les risques dans toute la mesure du possible (intégration de la sécurité à la conception et à la construction de la machine),
- prendre les mesures de protection nécessaires vis-à-vis des risques ne pouvant être éliminés,
- informer les utilisateurs des risques résiduels dus à l’efficacité incomplète des mesures de protection adoptées, indiquer si une formation particulière est requise et signaler s’il est nécessaire de prévoir un équipement de protection individuelle.
c) Lors de la conception et de la construction de la machine et lors de la rédaction de la notice d’instructions, le fabricant ou son mandataire doit envisager non seulement l’usage normal de la machine mais également tout mauvais usage raisonnablement prévisible.
La machine doit être conçue et construite de manière à éviter qu’elle soit utilisée de façon anormale, si un tel mode d’utilisation engendre un risque. Le cas échéant, la notice d’instructions doit attirer l’attention de l’utilisateur sur les contre-indications d’emploi de la machine qui, d’après l’expérience, pourraient se présenter.
d) La machine doit être conçue et construite pour tenir compte des contraintes imposées à l’opérateur par l’utilisation nécessaire ou prévisible d’un équipement de protection individuelle.
e) La machine doit être livrée avec tous les équipements et accessoires spéciaux essentiels pour qu’elle puisse être réglée, entretenue et utilisée en toute sécurité.
1.7.4.2.
Contenu de la notice d’instructions
Chaque notice doit contenir, le cas échéant, au moins les informations suivantes : (…)
l) Les informations sur les risques résiduels qui subsistent malgré le fait que la sécurité a été intégrée à la
conception de la machine et que des mesures de protection et des mesures de prévention complémentaires ont été prises ;
3.4.4.
Chutes d’objets
Lorsque pour une machine automotrice avec conducteur, opérateur(s) ou autre(s) personne(s) portée(s), il existe un risque dû à des chutes d’objets ou de matériaux, la machine doit être conçue et construite de manière à tenir compte de ces risques et être munie, si ses dimensions le permettent, d’une structure de protection appropriée.
Cette structure doit être telle qu’en cas de chutes d’objets ou de matériaux, elle garantisse aux personnes portées un volume limite de déformation adéquat.
Afin de vérifier si la structure répond à l’exigence visée au deuxième alinéa, le fabricant ou son mandataire doit effectuer ou faire effectuer, pour chaque type de structure, des essais appropriés.
ANNEXE B
SOLUTIONS TECHNIQUES MINIMALES
La décision d’exécution (UE) de la Commission du 26 avril 2024 a statué que la norme harmonisée EN 12525 : 2000 + A2 : 2010
Matériel agricole - Chargeurs frontaux - Sécurité ne conférait plus de présomption de conformité aux EESS énoncées au point 1.1.2 de l’annexe I de la directive du 17 mai 2006 précitée, qui exige des mesures techniques, et non des mesures organisationnelles, telles que des structures de protection atténuant spécifiquement les chutes au lieu de traiter d’autres scénarios d’accident, y compris les événements de renversement de véhicule, et au point 1.7.4,2 l) de l’annexe I de la directive du 17 mai 2006 précitée, qui exige des informations sur les risques résiduels qui subsistent malgré les mesures de conception sûres, de sauvegarde et de protection complémentaires adoptées.
Les solutions techniques à mettre en œuvre doivent permettre de satisfaire aux EESS 1.1.2 et 1.7.4.2 l). Il s’agit notamment de traiter par des mesures techniques le risque de chute d’objets sur le conducteur du tracteur conformément à l’EESS 3.4.4 de l’annexe I de la directive du 17 mai 2006 précitée.
Le risque diffère selon l’équipement utilisé en bout de bras du chargeur, la charge ou la hauteur de levée.
Presque tous les accidents graves ou mortels liés à l’utilisation d’un chargeur frontal sont dus à la chute d’une balle de fourrage lors de sa manutention sans utiliser un équipement adapté au maintien correct des charges unitaires, celle-ci ayant des dimensions et une masse importante. Lors de sa chute, soit elle tombe directement sur le conducteur, soit elle roule le long des bras du chargeur frontal pour terminer sa course sur le conducteur s’il n’y a aucune structure qui la retienne.
Cas 1 : chargeur frontal équipé en permanence d’un godet :
L’utilisation d’un chargeur frontal avec un godet à des fins uniquement de manutention de charge en vrac ne présente pas de risque de chute d’objets sur le conducteur quel que soit la masse de la charge en vrac ou la hauteur de levée. En effet, en cas d’inclinaison malencontreuse du tracteur, du chargeur frontal ou du godet, la charge en vrac s’écoulera à la verticale et donc à distance du conducteur. Dans ce cas, aucune mesure technique n’est nécessaire pour protéger le conducteur. Ce cas est rare car la plupart des chargeurs frontaux sont équipés d’un dispositif d’attache rapide permettant d’utiliser différents équipements en bout de bras.
Si un fabricant conçoit un chargeur frontal dont l’usage est exclusivement limité à celui d’un godet, il doit mettre en place des mesures intrinsèques empêchant l’utilisateur de monter un autre type d’équipement en bout de bras de manière raisonnablement prévisible et le spécifier dans les conditions et limites d’utilisation de la notice d’instructions. Le remplacement du godet par un autre type d’équipement, réalisé par l’utilisateur, est une modification nécessitant une nouvelle évaluation des risques que doit faire l’utilisateur.
La notice d’instructions doit préciser que le godet ne doit pas être utilisé pour des opérations de levage ou de manutention de charges unitaires (par exemple balle de foin).
Cas 2 : chargeur frontal équipé d’un accessoire de levage de charges unitaires monté sur un tracteur équipé d’une SPCO (FOPS) ou d’une SCPR (ROPS) composée de quatre montants, éventuellement intégrée à une cabine :
Dans ce cas, le conducteur est protégé par la structure lors d’une chute de balle de fourrage compte-tenu de la masse et des dimensions. Il ne s’agit pas d’une mesure de protection intrinsèque montée sur le chargeur frontal mais plusieurs accidents sans conséquence pour le conducteur ont montré l’efficacité de ces protections.
La notice d’instructions doit préciser la limite d’utilisation et décrire les usages interdits.
Cas 3 : chargeur frontal équipé d’un accessoire de levage de charges unitaires monté sur un tracteur sans SPCO (FOPS
) ou sans SCPR (ROPS
) composée de quatre montants, éventuellement intégrée à une cabine :
Ce cas concerne les tracteurs dépourvus d’une SPCO (
FOPS) ou d’une SPCR (
ROPS) composée de quatre montants. Les tracteurs dont la SPCR (
ROPS) est seulement composée de deux montants (arceau avant ou arceau arrière) ne protègent pas correctement le conducteur des chutes d’objets.
L’utilisation d’un chargeur frontal utilisé avec un équipement de levage de charges unitaires (exemple : fourches) présente un risque majeur dès lors que la charge dépasse une certaine masse et est levée à une hauteur suffisante pour tomber sur le conducteur du tracteur.
1re mesure technique possible :
Limiter la hauteur de levée des bras par l’installation d’un dispositif de protection (exemple : butée mécanique).
La hauteur doit être déterminée de telle sorte qu’une charge ne puisse pas, dans une utilisation raisonnablement prévisible, rouler sur les bras du chargeur pour finir sa course sur le conducteur.
La notice d’instructions doit préciser la limite d’utilisation et décrire les usages interdits (superposition de charge par exemple).
2e mesure technique possible :
Equiper le chargeur frontal d’une structure de protection du conducteur. Celle-ci installée sur le chargeur lui- même a une conception différente des SPCO (
FOPS) installées sur les tracteurs.
Les dimensions et la résistance de celle-ci doivent être déterminées de telle manière à pouvoir protéger l’opérateur efficacement compte tenu du type de charges unitaires que le chargeur frontal est destiné à lever.
Celle-ci ne doit pas générer de nouveaux risques ; de manière non exhaustive, elle doit impacter le moins possible la stabilité de l’ensemble composé du tracteur et du chargeur frontal, ne pas générer des risques de pincement ou d’écrasement ou ne pas réduire de manière significative la visibilité du conducteur du tracteur.
Dans le cas d’une structure de protection du conducteur fixée sur une SPCR (
ROPS), le mode de fixation ne doit pas dégrader la résistance mécanique de celle-ci (pas de perçage, de soudage…).
La notice d’instructions doit préciser la limite d’utilisation et décrire les usages interdits.
3e mesure technique possible :
Si le fabricant du chargeur frontal est le fabricant du tracteur, équiper le tracteur d’une SPCO (
FOPS) ou d’une SPCR (
ROPS) composée de quatre montants.
Si un fabricant tiers met isolément sur le marché une SPCO (FOPS) montée sur le tracteur, celle-ci est une entité technique distincte soumise à réception en respect du règlement (UE) no 167/2013 du 5 février 2013 relatif à la réception et à la surveillance du marché des véhicules agricoles et forestiers.
Autre mesure technique possible :
Tout autre mesure technique ayant un effet équivalent et permettant de traiter le risque peut être mise en œuvre par le fabricant sur la base de son analyse de risque.
ANNEXE C
MESURES POSSIBLES À METTRE EN PLACE PAR LES EMPLOYEURS UTILISATEURS
Cas 1 : chargeur frontal équipé en permanence d’un godet :
L’employeur doit veiller à ce que le godet soit utilisé uniquement avec des charges en vrac. Il ne doit pas modifier le chargeur frontal pour l’utiliser avec un autre équipement en bout de bras. Il peut changer la taille du godet.
Cas 2 : chargeur frontal équipé d’un accessoire de levage de charges unitaires monté sur un tracteur équipé d’une SPCO (FOPS
) ou d’une SCPR (ROPS
) composée de quatre montants, éventuellement intégrée à une cabine :
Dans ce cas, il n’y a aucune mesure particulière à prendre excepté veiller à respecter les limites d’utilisation décrites dans la notice d’utilisation.
Cas 3 : chargeur frontal équipé d’un accessoire de levage de charges unitaires monté sur un tracteur sans SPCO (FOPS
) ou sans SCPR (ROPS
) composée de quatre montants, éventuellement intégrée à une cabine :
Ce cas concerne les tracteurs dépourvus d’une SPCO (
FOPS) ou d’une SPCR (
ROPS) composée de quatre montants et également ceux dont la SPCR (
ROPS) est seulement composée de deux montants (arceau avant ou arceau arrière).
Le conducteur n’est pas protégé en cas de chute d’objets.
Le chargeur frontal présente un risque significatif en cas de chute d’objets. Il doit être mis en sécurité ou remplacé par un chargeur frontal conforme. Dans l’attente, des mesures conservatoires doivent être mises en place.
Mesures organisationnelles dans l’attente de la mise en sécurité :
- l’employeur utilise un autre équipement conforme pour réaliser les opérations à risques. (exemple : chariot télescopique conforme) ; ou
- l’employeur s’assure que le chargeur frontal ne soit utilisé qu’avec des équipements interchangeables ou des outils montés en bout de bras du chargeur frontal assurant que toutes les charges unitaires soient correctement maintenues sans aucune possibilité de chute sur le conducteur.
Mesures techniques de mise en sécurité : les mesures suivantes peuvent être prises (liste non exhaustive) :
- installer le chargeur frontal sur un tracteur équipé d’une SPCO (
FOPS) ou d’une SPCR (
ROPS) à quatre montants ; ou
- installer un dispositif permettant de restreindre la hauteur maximale de levage de la charge (exemple : blocage mécanique) ; ou
- modifier le tracteur agricole en lui ajoutant une SPCO (
FOPS), celle-ci doit être réalisée par le fabricant d’origine ou un professionnel en suivant le mode opératoire décrit par le logiciel Secutrac© développé par INRAE et téléchargeable à partir d’une page du site du ministère.
Source Légifrance